Adama Traore : ces morts que l’on ne compte plus, cette injustice qui gagne

[mise à jour]

Beaumont-sur-Oise était une ville sans histoires jusqu’au 19 juillet dernier et la mort d’Adama Traore le soir de son 24e anniversaire. Depuis ce drame sa famille réclame avec dignité et abnégation que justice soit rendue. Sans appels à la haine, sans rejet des institutions, la famille Traore continue son combat contre l’omerta de services qui refusent de procéder à leur auto-critique.

 

En période de doutes et d’interrogations, le devoir des politiques est de veiller au bien vivre de la cité en respectant la devise de la nation : liberté, égalité, fraternité. Mais à Beaumont, sur fond de radicalisation politique, la maire a décidé de se définir un « camp » là où rien n’en dessinait ni n’en opposait. En opposant les prétendus « français de souche » aux « autres », la Maire a opté pour une instrumentalisation politique qui va à l’encontre de toute logique.

 

Les appels au calme de la famille et des proches tranchent avec l’acharnement politique dont ils sont la cible et rappelle combien la force du collectif supplante celle du pouvoir politique quand il est tenu par des personnes incapables de faire passer l’intérêt collectif avant les intérêts individuels. La plainte de la maire contre la famille Traore, la volonté de faire prendre en charge ses frais de justice par la municipalité, l’interdiction reçue d’assister aux conseils municipaux, sont autant d’atteintes à la fonction de l’élu, désigné pour faire régner l’ordre dans le respect de l’égalité.

 

Youssouf et Bagui Traoré étaient poursuivis pour des outrages et menaces à l’encontre de huit gendarmes et policiers municipaux qui auraient eu lieu en marge d’un conseil municipal à Beaumont-sur-Oise le 17 novembre. Ce soir là, la famille et les proches étaient réunis devant la Mairie pour protester contre la dernière provocation de la maire : sa demande d’obtenir la prise en charge de ses frais de justice par la collectivité.

 

Comme pour l’enquête sur la mort de leur frère Adama, les témoignages des forces de l’ordre ne sont corroborés par aucune preuve. Seuls les témoignages des policiers, en solidarité de corps avec les gendarmes, ont présidé au jugement. Comme pour l’enquête sur la mort d’Adama, le flou qui entoure leurs déclarations et les regards contradictoire des experts entretiennent un doute important. Dans ces deux cas, c’est une seule et même famille qui est victime.

 

Face à l’acharnement dont elle est l’objet, nous ne pouvons que témoigner tout son soutien à la famille Traoré et dénoncer dans ce dossier une dérive mortifère pour la société française. La justice doit être la même pour toutes et tous, c’est le gage d’une démocratie vivante. C’est la raison pour laquelle il faut demander la généralisation des contre-expertises indépendante ainsi que le renforcement des dispositifs de recensement des violences policières et l’établissement d’un récépissé pour les contrôles d’identité, promesse non tenue du candidat Hollande et fossé dans lequel l’extrême-droite et les droites se repaissent.

Des moyens supplémentaires devraient également être mis au service de la formation des agents de la sécurité nationale. Le fait que l’essentiel des forces de l’ordre impliquées dans ces affaires soient en début de carrière confirme la nécessité d’une amélioration de la formation des agents. Une nécessité d’autant plus accrue par l’épuisement des forces de l’ordre, particulièrement sollicitées et exploitées dans un contexte de risque terroriste et de brutalisation de la société. La famille réclame cette formation des forces de l’ordre, rejoignant les demandes de certains syndicats policiers et des ONG.

Ce samedi 22 juillet, Adama Traore aurait du fêter ses 25 ans. A la place, nous avons défilé, nombreuses et nombreux, déterminé-es et solidaires, dans le calme mais avec fermeté, pour rappeler qu’un an après les faits, l’affaire continue de s’engluer et la famille continue à être une cible. Leur refus de laisser le flou et le mensonge gagner sont leur faute pour certain-es. Une situation inacceptable pour les milliers de personnes présentes et toutes celles qui soutiennent, de loin, au jour le jour.

L’affaire Traore ne devrait pas exister. Les moyens d’immobilisation létaux utilisés sont interdits par bon nombre de pays du fait de l’impossibilité de la victime de se dégager et de la mort certaine qu’elles induisent. Nombreux sont les morts ainsi comptabilisés en France… pourtant, malgré le deuil et le douleur des familles et des proches, rien ne bouge et les jeunes hommes continuent de tomber. Des moyens existent pour que la justice soit rendue dans le respect et l’égalité : ayons le courage politique de les mettre en œuvre.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *