La France est le pays des droits de l’homme, ou au moins de certains hommes. Mais la question des droits des femmes est loin d’être centrale : des affaires DSK ou Baupin à l’affaire Hamou en passant par le harcèlement de rue, les agressions faites aux femmes trouvent dans la presse comme dans l’opinion publique des echos atténuateurs qui sont une insulte aux victimes.
La question du consentement, mise en avant par nombre d’activistes féministes, est pourtant centrale : un non est un non, il ne connait ni nuances ni dérogations. La sentence semble simple, mais sa compréhension l’est beaucoup moins : Les victimes Baupin ? Elles n’ont pas compris ce qu’était du « libertinage » ! Maly Thomas, la journaliste embrassée de force en direct par Maxime Hamou ? C’était pour rire ! Les cris « à poil! » devant l’un des rares films autour d’unE super héroïne ? Vous comprenez rien à l’humour, c’est potache ! Etc.
Ce comportement a une qualification : le sexisme. Forcer une femme, forcer une personne en général, n’est pas un jeu et ça ne devrait pas être légal, tout simplement. Ce ne sont pas des dérapages : ce sont des agressions, les mots ont un sens. Mais si ces affaires ont un goût particulièrement amer pour les victimes, c’est également en raison du statut de l’agresseur. Les hommes qui harcèlent les femmes à La Chapelle sont des monstres. Polanski qui fuit sa condamnation pour viol sur mineure est un artiste : le statut de l’homme connu prime sur l’agression. Il y a dans ce traitement une logique de classe qui déclasse les inconnus et absout les stars. Ce qui pour la victime constitue une double condamnation : celle de l’agression et celle de la réprobation publique.
Toute action réalisée sans le consentement de la personne relève du domaine de l’agression et chacune d’entre elles devrait être condamnée. Malgré un nombre de femmes battues et agressées qui ne faiblit pas en France, malgré un traitement des affaires qui condamne la victime à prouver son statut, les reculs des gouvernements successifs sur les droits des femmes sont patents .Valls premier ministre a fait disparaitre le ministère dédié, reléguant cette question à un simple secrétariat d’Etat, et les appellations et ajouts les plus farfelus se sont succédés….
Pourtant, les violences faites aux femmes sont un fléau qui concerne 51% de la population. Chaque année, 84 000 femmes sont victimes de viols ou de tentatives de viol. Seulement 10% d’entre elles portent plainte et rares sont les condamnations. Une réalité qui pousse au renoncement nombre de victimes qui ne se sentent ni écoutées, ni respectées et voient ce parcours qui va de la plainte au procès comme une épreuve supplémentaire s’ajoutant au traumatisme de l’agression.
Le gouvernement Macron s’est dit volontaire pour porter ces questions et faire avancer les droits des femmes, il est temps pour elles et eux de passer des discours aux actes : les victimes n’ont pas le loisir d’attendre encore un peu plus. Les chantiers sont longs et passent à la fois par un renforcement des condamnations, un meilleur suivi des victimes et un important travail de pédagogie dès la petite enfance sur les questions liées au genre et sur le vocabulaire : comprendre que les mots et les comportements ont un impact qui peut blesser à vie est un outil de déconstruction essentiel de ces problématiques. Chaque fois que les droits des femmes progressent, c’est toute la société qui en bénéficie.
Les femmes se rassemblent depuis des dizaines d’années dans des espaces non-mixtes pour avoir la possibilité de partager leur vécu sans peur du jugement des hommes ou de leur culpabilité rédemptrice autocentrée. Elles le font parce que dans une société où la parole de l’homme a toujours plus de poids social que la parole de la femme, la non-mixité est un des outils les plus rassurants pour parler sororité et riposte, pour avancer sans peur et pour créer des outils de riposte adaptés. Pourtant, cet immense travail que mènent les associations sur le terrain n’est toujours pas suffisant, faute de reprise politique volontaire. C’est donc aux politiques de se saisir de ces questions pour agir durablement contre les violences faites aux femmes : contre toutes les violences contre toutes les femmes, sans modèle normatif et dans le respect de nos différences. Car nous ne sommes pas une, nous ne sommes pas interchangeables, et nos différences recèlent elles aussi des oppressions diverses que les outils réflexifs de l’intersectionnalité des luttes nous permet de valoriser.
En ces temps de moralisation de la vie politique, il est urgent que la classe politique montre l’exemple en prenant des mesures fortes contre ces politiques qui prennent les femmes qui les entourent pour de la chair offerte. Une mesure évidente est essentielle à prendre de toute urgence est celle de l’inéligibilité pour les élus condamnés pour harcèlement, agressions sexuelles ou viols. Cher-es macronnistes, en parler c’est bien, le faire, c’est mieux.